Rien qu’à ces quelques mots innocents, je sens qu’il y en a qui jubilent. Un certain générique résonne déjà comme chant céleste à leurs oreilles.
Réjouissez-vous bon peuple je vais vous parler de Kaamelott.
[ En même temps, on a fait un tel débat à la gloire d’Alexandre Astier (dit maintenant officiellement Dieu après concertation) en commentaire la dernière fois avec mon estimée collègue Le Roy Dit Nous Voulons, que je ne pouvais pas contourner le sujet.]
- Kaameloot en chiffres et en technique.
Création : Alexandre Astier
Production : CALT
Chaîne de diffusion originale: M6
Diffusion : de janvier 2005/octobre 2009
Saisons / nombre d’épisodes: 6/ 458
Format : Épisodes de 3min puis 7. Et enfin 9 épisodes de 40min.
Bon si on est joueur on peut ajouter:
Dialogues : Alexandre Astier (au moins en partie
Producteur artistique: Alexandre Astier
Musique : Alexandre Astier
Costumes : Alexandre Astier… Ah non ça c’est sa femme! Pardon.
- Le concept
La légende du Roi Arthur et de la table ronde, et sa genèse, vues sur un mode humoristique et décalé.
Le Roi Arthur est un homme bon, intelligent mais déprimé par le poids de sa destiné. Il faut dire que trouver le Graal et diriger Britannia avec une bande de bras cassés pareils, ça ne relève pas du pique nique champêtre.
Détruisant la légende des grands, vaillants et purs Chevaliers, Astier les ramène, dans Kaamelott, un peu plus près de la vérité historique : de petits seigneurs terriens, pas forcément éduqués, un poil bourrins et plus ou moins proches de la bouteille.
Un peu,on a dit !
Sans pourtant jamais tomber dans une caricature vulgaire.
Ses Chevaliers sont simplement humains en fait et correspondent à leur époque.
A quelques anachronismes de langage près.
- La recette du succès
Kaamelott est un savant cocktail qui a eu l’atout d’être composé et imaginé par un homme à la fois intelligent, créatif et curieux.
Si le concept d’Alexandre Astier a tenu la route c’est parce qu’il a eu la volonté de proposer quelque chose de construit, de recherché, de marrant et d’original.
Pour ceux qui ont déjà écouté parler ce cher Alexandre, parfois virulent, il est plutôt contre la » merde » à la télévision et ne voit pas d’incompatibilité entre l’humour et la culture.
Et pour cela il a fait un certain nombre de recherches sur l’histoire d’Arthur et du Graal.
Comme il l’a fait aussi pour ses deux spectacles Que ma joie demeure et l’Exoconférence. C’est une méthode de travail chez lui. Oui cet homme là est un bel esprit.
De ses recherches découle tout le contexte historique qui constitue le cadre de la série (L’évêque Boniface, les débuts de l’Eglise, l’importance du duc d’Aquitaine, les Burgondes, Les invasions saxonnes Rome sur le déclin).
Contexte relativement exact, pour ce qu’on a pu en retirer des légendes arthuriennes, étant donné que le personnage d’Arthur n’est pas historiquement identifié avec certitude.
Un des éléments concrets qu’Alexandre Astier a su reprendre avec finesse c’est que le roi Arthur au fil de sa légende grandissante, qu’il ait existé ou non, représentait les espoirs du peuple breton, l’espoir d’un monarque bon, sage et fédérateur qui délivrait du joug étranger.
Une lourde charge qui semble bien peser sur les épaules du roi Arthur de Kaamelott, expliquant peut-être le découragement du personnage.
Un autre exemple simple du souci historique d’Astier: il fait, dans divers épisodes, référence à la signification celtique du prénom Arthur (qui signifie à la fois ours et guerrier) en rappelant son rapport avec l’ours.
C’est ce contraste entre contexte historique recherché ( incluant décors et costumes) et un humour virulent et décalé qui fait le succès presque immédiat de Kaamelott.
Et c’est l’effacement de cet humour qui va faire grincer des dents.
Pourtant, le côté comique reste présent dans Kaamelott, mais dans les dernières saisons, la série bascule vers une ambiance plus sombre.
C’est le moment où je vais me faire des amis (ou pas!) en défendant la démarche d’Astier.
Car oui, en fait Kaamelott ce n’est pas drôle. L’histoire d’Arthur n’est pas drôle.
C’est quand même un homme qui voue sa vie à une quête presque impossible et qui va être trahi amoureusement par son plus fidèle soutien.
Sans compter que gouverner à cette époque c’est quand même pas une partie de plaisir.
Pour incarner la lumière et l’unité des peuples on repassera…
D’ailleurs je pense qu’Astier est dans le vrai sur la relation Arthur/ Guenièvre en montrant leur mariage comme une alliance diplomatique visant à la fédération de clans. Même si pour le coup on est loin de la grande histoire qu’on a vendu aux amoureux pendant des lustres.
Bref. Tout ça pour dire que, selon moi, l’aspect dramatique de Kaamelott était sous- jacent dès le départ, il est intrinsèque à la légende qui a quelque chose de tragique.Il ne m’a donc pas paru délirant qu’il prenne le dessus au fur et à mesure de l’avancée de l’histoire.
- La Team Astier & Cie : le petit plus pour le succès
Et là je peux le clamer une fois de plus de façon jubilatoire : Une bonne équipe soudée c’est un élément clé.
Et Kaamelott en est la preuve. La preuve ultime même.
Outre le fait de faire participer sa mère, sa compagne, son père, son demi-frère, sa belle-mère, ses enfants, Astier a eu l’intelligence de faire appel aux talents des amis et de savoir repartir les compétences de chacun.
Ainsi on retrouve aux dialogues Nicolas Gabion (Bohort) et Joëlle Sevilla (Sélie), à la direction artistique Jean-Christophe Hembert ( Karadoc), au montage Simon Astier (Yvain).
J’ai tendance à penser que ce cher artiste, qui a les défauts de ses qualités, a ainsi placé des gens compétents et proches qui connaissaient bien son caractère, en soupapes de sécurité.
En sus du bonus de petites références familiales.
Oui selon l’aveu même de Joëlle Sevilla, ce ne serait pas qu’une légende…
L’avantage c’est que la créativité semble être de façon innée une affaire d’équipe ( et de famille) chez les Astier. Il suffit de jeter un oeil sur Hero Corp (création Simon Astier) et son équipe pour s’en convaincre.
- Des répliques cultes
Kaamelott a su complètement trouver sa place et gagner ses galons ( et son public de fans) dans le PAF. Et il est indéniable que son exemple dénote de l’influence sociale des séries, tant ses répliques sont ancrés dans notre quotidien.
De l’inoubliable C’est pas faux à d’autres perles, petit florilège.
Quand on veut être sûr de son coup, mon petit bonhomme, on plante des carottes, on ne joue pas les chefs d’État !
Anouk Grinberg, Kaamelott, Livre V, 30 : La Supplique, écrit par Alexandre Astier.
Sortez vous les doigts du cul !!!
Alexandre Astier, Kaamelott, Livre I, Codes et Stratégies, écrit par Alexandre Astier.
Perceval) Rangez moi ça, débile, la table ronde, c’est pas la fête de l’artisanat !
Alexandre Astier, Kaamelott, Livre I, De retour de Judée, écrit par Alexandre Astier.
pas inventé le plat de la main morte celui-là.
Antoine de Caunes, Kaamelott, Livre V, 22 :La promesse, écrit par Alexandre Astier.
Quoi ? Qu’est-ce qu’y a ? On cherche la marave ?
Axelle Laffont, Kaamelott, Livre III, 16 :Séfriane d’Aquitaine , écrit par Alexandre Astier.
[ Depuis celle là y’a des médisants qui me surnomment Séfriane. Franchement j’vois pas pourquoi.]
Des bandits? Nooon… Des gars futés !
Loïc Varraut, Kaamelott, Livre II, 24 : Les Tuteurs , écrit par Alexandre Astier.
(À Bohort)
Vous êtes marié, comme moi ; vous savez que la monstruosité peut prendre des formes très diverses.
Lionnel Astier, Kaamelott, Livre I, L’Escorte, écrit par Lionel Astier.
Tout le monde le sait, en Carmélide, que vous êtes une patate. Seulement, ça passe parce que les gens savent que c’est moi qui tire les ficelles dans l’arrière boutique.
Joëlle Sevilla, Kaamelott, Livre IV, 1 : Tous les matins du monde, écrit par Alexandre Astier.
(À Yvain et à Guenièvre) Si les dieux avaient dû être de notre côté, ils nous auraient pas refilé des enfants comme vous.
Joëlle Sevilla, Kaamelott, Livre V, 12 : La Roche et le Fer, écrit par Alexandre Astier.
Et pour finir en beauté
Guethenoc : Ah mais tout à fait, c’est pas moi qui vais vous dire le contraire. ON a deux trois belles pièces, y’a pas à rougir hein ! Et bin celui d’hier que vous m’avez envoyé, attention j’ai jamais vu ça ! Pourtant j’en ai vu hein ! Du barré congénital, des dégénérés de la campagne, j’en ai vu un paquet hein ! Mais lui, on comprend ni ce qu’il dit, ni ce qu’il fait ! C’est rare !
Arthur : Non mais c’est un peu particulier parce qu’il était en mission spéciale …
Guethenoc : Ah oui oui oui oui oui, je sais, il nous a dit heu … ah ouais : « subrogative »(…) enfin de toute façon ce que je voulais vous dire, c’est que la nature elle est trop hostile pour un gars comme ça. Non mais attend, un de ces jours, y’a un agriculteur, il va pas se poser de questions, qui va lui mettre une fourche dans la tête. Non c’est pour ça, moi je viens vous voir …
Serge Papagalli, Kaamelott, Livre III, 77 :L’Espion, écrit par Alexandre Astier.
Il parait que la série pourrait repartir en production. Selon Joëlle Sevilla, Alexandre Astier en aurait exprimé l’envie.
En attendant la série est toujours rediffusée sur Paris Première.
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