Inspirés de contes pour enfants parfois terrifiants ou peu glorieux pour les femmes, les Disney de notre enfance ont quelquefois des dessous quelque peu étranges quand on s’y intéresse de plus près.
Retour sur La Petite Sirène, un dessin animé pas si innocent que cela …
Adaptation et bikini.
Fidèles à l’esprit Disney, les scénaristes ont eu le réflexe d’épurer le conte original d’Hans Christian Andersen, pour éviter de traumatiser le jeune public (du moins selon leurs critères…). Adieu donc souffrance terrible de la transformation, douleur comparable à des poignards qui transpercent les pieds de la petite ondine lorsqu’elle marche et disparition funeste.
Bonjour crabe qui chante, goéland amusant, bikini en coquillage, happy ending et ambiance tropicale.
Mais sous cet esprit bon enfant, le dessin animé, comme bien d’autres, recèle une image de la femme peu flatteuse.
Je passe sur le bikini en coquillage ( c’est quand même avec Jasmine, une des princesses les plus dévêtues de Disney ! ), la taille anorexique, le côté nunuche, le nom de lessive, le fait qu’Ariel (qui doit être plus douée pour la lessive que l’aventure, niark, niark) ait besoin de personnage essentiellement masculins pour s’en sortir (Sébastien, Polochon, son père et le prince) et qu’en parallèle la méchante soit une femme.
J’en profite pour rappeler que dans le conte d’origine ce sont les soeurs de la petite ondine qui tentent de l’aider… Je dis ça… j’dis rien.
Ce sont des éléments plus ou moins communs à toutes les héroïnes de Disney, du moins pour les plus anciennes. Donc fi de tout cela !
La problématique du body language.
J’aimerais plutôt que l’on s’arrête sur la chanson d’Ursula quelques minutes.
Stop ! Pardon ! Retour en arrière please ! Qu’est-ce-qu’elle vient de dire la dame ?
You’ll have your looks!
Your pretty face!
And don’t underestimate the importance of body language! Ha!The men up there don’t like a lot of blabber
They think a girl who gossips is a bore
Yes, on land it’s much preferred
For ladies not to say a word
And, after all, dear, what is idle prattle for?Come on, they’re not all that impressed with conversation
True gentlemen avoid it when they can
But they dote and swoon and fawn
On a lady who’s withdrawn
It’s she who holds her tongue who gets her man
Ouhlà ! Résumons nous deux minutes. Si je traduis bien, dans un Disney où toutes les petites filles vont s’identifier à l’héroïne, on est en train de dire en substance: Joue de ton corps, sois belle et tais-toi ?
Il n’y a que moi que cela fait bondir ?
Alors je sais, je ne suis quand même pas née de la dernière pluie, que jusqu’à récemment les héroïnes Disney étaient toutes plus ou moins ambivalentes, voir carrément négatives pour la représentation que peut se faire une petite fille de la place de la femme.
D’ailleurs, cela fait partie des contes originaux et Disney a pour certains sérieusement allégé les choses. Du moins si l’on en croit les interprétations. Ne serait-ce que pour le cas de Blanche-Neige par exemple, pour qui la fin , le sommeil, le cercueil de verre tout ça, serait en réalité bien plus trash qu’il n’y parait et que nombre d’éléments évoquant la sexualité apparenterait à un conte d’initiation féminin pour les jeunes filles chastes.
Ce qui me fait sursauter ici c’est que non seulement les choses sont dites très explicitement, gestuelle explicite à l’appui, mais de surcroît la théorie d’Ursula se vérifie. En effet, souvenez-vous, Ariel parvient à séduire le Prince, en trois jours, sans piper mot et qu’elle est à deux doigts de réussir avant qu’Ursula intervienne.
Même en admettant le second degré (qui dépasse largement l’entendement du public visé hein ! J’ai testé l’ironie, à 5 ans, ça leur passe au -dessus mais looooin) c’est quand même terriblement misogyne et rétrograde toute ça.
Bon, ce n’est pas très glorieux pour l’image du Prince non plus, soit dit en passant. Eh oui, soyons francs, en trois jours, cet homme-là est prêt à épouser une fille:
- Dont il ne sait rien. Même pas d’où elle vient.
- Avec qui il n’a jamais eu une seule conversation.
- Qui se coiffe avec sa fourchette.
- Qu’il a ramassée sur la plage, plus ou moins habillée et qui ne savait pas marcher.
Conclusion: Soit cet homme est très atteint et très naïf. Soit il est mort de faim.Dans les deux cas, il ne vend pas du rêve.
Si je conçois parfaitement qu’un enfant n’ait pas la même compréhension de ce discours que moi (adulte standard), je m’interroge quand même. Le discours ne m’avait pas choquée enfant, mais il est resté dans ma mémoire jusqu’à aujourd’hui (sans avoir revu le dessin animé. Donc il est resté facilement 20 ans en stock).
Ce qui veut dire que, même sans le comprendre, celui-ci s’imprime dans le cerveau de l’enfant. Et là est ma question: que va-t-il en rester dans le subconscient ? On est quand même en train de dire à des petites filles: sers-toi de ton corps et non de ton esprit pour séduire si tu veux y arriver.
Est-ce vraiment une bonne idée ?
J’ai été petite, j’ai aimé les princesses de Disney et les Barbies. Cependant j’ai trouvé en parallèle d’autres modèles dans la lecture et dans mon entourage.
Mais quid d’un enfant plus vulnérable ? Vous imaginez quand même bien que la version adulte peut donner ça :
Heureusement que tant Disney que Mattel ont fait quelques progrès niveau stéréotypes féminins, mais tout de même, il n’y a pas à dire, on a été gâté(e)s sur ce plan-là !
Pour en savoir plus sur les secrets des contes de fées et leurs adaptations : Je vous engage à aller voir ces articles des Mondes de Blanche:
- Un peu d’histoire littéraire
- Détournements et adaptations
- Blanche Neige à travers les âges
- Le Petit Chaperon Rouge au cinéma.
- Adaptations de contes: quand la méchante ne l’est pas.
- Une romance intemporelle: La Belle et la Bête.
Merci à Pimpf d’avoir secouru ma mémoire défectueuse.
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