La semaine passée, Bettie Rose Books, notre malicieux flamand rose numérique déguisait son Top Ten Tuesday en interrogation écrite. La coquine ! Elle nous posait ainsi les 10 questions de lecteur dont elle voulait discuter avec nous.
10 questions si pertinentes qu’elles méritaient bien une réponse détaillée. Je ne fus pas d’ailleurs la seule à le penser. Je vous invite à retrouver les réponses de Bettie Rose Books qui, belle joueuse, s’est pliée à son propre exercice.
Quant à moi, après avoir longuement cogité, vous trouverez ma copie ci-dessous.

1. Le lecteur-blogueur est-il un lecteur plus exigeant que les autres ?
Grande question mais je dirais que oui pour la majorité. Son rendement de lecture est souvent plus important que la moyenne et son souci de suivre l’actualité littéraire l’amène souvent à se confronter à des styles très différents. De fait, selon moi, le lecteur-blogueur affine ses critères d’exigence en matière de lecture.
Par ailleurs, je pense que pour beaucoup, nous sommes tous conscients d’apporter un critère de jugement dans nos chroniques. Nous allons forcément influencer un lecteur potentiel en bien ou en mal. Ce qui nous amène à tenter d’être le plus objectifs possible et donc à ne pas laisser l’affect obscurcir notre jugement. Cet élément aussi affecte d’une certaine façon nos exigences, les rends plus fermes.
2. Peut-on parler de bons et de mauvais lecteurs ? Si oui, qu’est ce qui justifie leur catégorisation ?
Ah Bettie Rose ma douce ! Tu touches là où cela fait mal. Je ne crois pas qu’il existe de bons ou de mauvais lecteurs. Un lecteur est un lecteur, quel que soit son rythme, ses genres de prédilection. Il y a juste des lecteurs moins avertis que d’autres. Le goût de la lecture c’est comme le palais en matière de vin, de thé ou de gastronomie, ça s’éduque. Ça se cultive en permanence. En tant que lecteur, il faut savoir délaisser les lectures faciles, aller vers d’autres horizons, dépasser sa zone de confort pour aller vers d’autres genres, d’autres auteurs. Ce qui rend la lecture passionnante c’est qu’elle est une découverte permanente, une ouverture constante de l’esprit.
Loin de jeter la pierre à ceux qui n’en ont découvert cet attrait de la lecture que tardivement, il faut encourager cette vocation nouvelle, les aider à cultiver ce goût en leur soumettant de nouveaux auteurs, de nouveaux livres, toujours plus travaillés, correspondant à leurs préférences.
3.Vraie ou fausse littérature ? Qu’en pensez-vous ?
Que la question ne pose même pas. Le livre est un objet dans son entier, sa globalité, comprenant tous types de genres, de styles, de niveaux de langages. Chaque livre peut trouver son lecteur. Un livre qui sera mauvais pour l’un, sera parfait pour l’autre. Bien sûr qu’il existe des niveaux de littérature différents, la différence entre un Neil Gaiman et un E. L. James est abyssale. Mais prenons garde à ne mépriser aucun genre, aucun style, car il faut garder à l’esprit que les littératures plus faciles ou légères, les livres de gare sont un excellent pont vers la lecture pour des lecteurs débutants, qui sont rebutés ou dégoûtés par les classiques.

Promouvoir la littérature et le livre sous toutes ses formes est un excellent moyen de s’assurer que tout un chacun lise et que la culture se diffuse. N’oublions pas que le livre est un symbole de liberté de pensée et d’expression et que la première chose que brûlent les régimes autoritaires ou fascistes sont les livres.
4. Lire « trop » est-il possible ?
Oui. Il faut que lecture rythme avec envie. Parfois l’enchaînement de livres produit une sensation d’écœurement, semblable curieusement à une indigestion. On n’arrive plus à prendre plaisir à sa lecture. Il faut savoir se laisser le temps de digérer une lecture. Surtout si elle a été prenante ou bouleversante.
5. A lire à un rythme « effréné », ne causons-nous pas nous mêmes les pannes de lecture ou la sensation de lassitude vis à vis d’un genre (par exemple) ?
Ma réponse est liée à la précédente. En effet, je pense que s’imposer un rythme effréné peut conduire à une forme de saturation ou des pannes de lectures. Les livres nous livrent des émotions positives ou négatives, et des informations. Les enchaîner trop rapidement sature notre cerveau, notre intellect. C’est un trop plein à traiter. Au lieu d’être un moment de pause privilégié, la lecture devient une tâche de fond.

6. Lire beaucoup est-il un réel facteur d’isolement social ?
Tout dépend de ce que l’on entend par beaucoup. En toute chose, l’excès s’avère négatif. Surtout que la lecture est un excellent moyen de se couper du monde, de s’isoler. Cependant, à mon sens, la lecture est aussi un excellent vecteur social. Regardez la blogosphère : combien de lecteurs/blogueurs en sont venus à écrire pour partager leurs lectures, échanger à leur sujet ? Combien d’entre vous se sont finalement retrouvés IRL sur des Salons du Livres, des rencontres d’auteurs en librairie ? Prenez Babelio ou LivreAddict qui sont des réseaux sociaux uniquement autour de la lecture. Penchez-vous sur le nombre d’échanges concernant les livres sur Twitter. Sans oublier le concept du livre voyageur. Tout cela illustre à quel point le livre peut créer du lien social.

7. Qu’attendez-vous d’une rencontre avec un(e) auteur(e) ?
Un moment de convivialité et de partage. Ce n’est positif pour personne si un auteur se force ou s’il est mal à l’aise avec ses lecteurs. J’aime que ces moments soient des occasions de mieux comprendre le livre, parfois de saisir des choses dont on est passé à côté et percevoir un peu mieux le fonctionnement de l’auteur.
8. Pensez-vous que l’on puisse tirer du positif ou quelque chose à retenir de chaque lecture, même de celles qu’on a pas du tout aimé ? Et à l’inverse, peut-on adorer un livre qui pourtant ne nous apporte rien de particulier ?
Un livre que l’on n’a pas aimé n’en demeure pas moins une expérience de lecture. On a au moins la satisfaction de s’y être confronté. De pouvoir mettre le doigt sur ce qui nous déplaît ou nous agace, parfois de nous en amuser. A l’inverse, un livre qui n’a rien de singulier peut tout à fait être une expérience de lecture satisfaisante, tout simplement parce-qu’il nous a offert ce dont on avait besoin : un moment de pause. Sans rien de plus.

9. Chroniquer un livre qu’on a pas aimé : bonne idée ou inutile ? Peut-on tout dire ?
A partir du moment où l’on sait et l’on décide de faire la part des choses et de rester objectif, pourquoi pas ? Après tout, chacun a le droit d’avoir son ressenti de lecture. On ne peut pas perpétuellement jouer le consensus et n’avoir que des avis positifs. Les seules règles pour moi sont :
- De rechercher les aspects positifs du livre
- Garder à l’esprit que si ce livre ne nous a pas plu, il peut plaire à quelqu’un d’autre.
- Se souvenir que lapider gratuitement un livre n’a rien de constructif.

10. Chroniquer un livre abandonné : pertinent ou mieux vaut s’abstenir ?
Mieux vaut s’abstenir. Personnellement c’est une règle : je ne chronique jamais un livre non terminé. J’estime que cela n’est pas objectif car on n’est pas à même de juger l’objet dans sa globalité. Il est communément admis dans le milieu de l’édition qu’on peut se faire une idée de la qualité d’un livre dans les 70 premières pages. Règle qui se vérifie relativement souvent. Cependant, il m’est arrivé plus d’une fois qu’un livre me surprenne dans les 120 dernières pages ou ne prenne son envol qu’à la moitié. Partant de cette expérience, je me refuse donc à chroniquer un livre abandonné.
8 réponses à “Le Top 10 Tuesday de Bettie Rose : Les réponses de June”
Je suis assez d’accord sur l’ensemble, en particulier sur le fait que chroniquer un livre qu’on n’a pas aimé c’est intéressant, mais que mieux vaut éviter de chroniquer un petit bout de livre pas fini. ^^ Quant à bonne ou mauvaise littérature, hum… Je suis partagée. Je fais partie des jeunes qui sont passés du fantastique au réalisme et de la litté ado à la litté adulte grâce à Lévy et Musso. Et je trouve que leurs premiers ne sont pas si mauvais. Mais quand je vois qu’on publie Fifty Shades ou After qui sont des fanfics de trucs déjà douteux, j’ai vraiment du mal. Je veux dire : est-ce que ces lectures ont vraiment déjà conduit des gens vers autre chose que les Harlequin ?
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C’est la grande question… Mais je pense que ça libère certains de l’appréhension de la lecture. Certes c’est mauvais mais ils découvrent le plaisir de la lecture et ça peut les conduire après vers d’autres auteurs et à monter leurs exigeances progressivement. Du moins c’est ce que j’ose espérer.. Il me faut trouver une raison valable à ce type de littérature…😂
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Alors j’espère que tu as raison !
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Je n’aurais pas dit mieux ! Et en bonus, les citations sont extrêmement chouettes 🙂
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Elles sont vraiment pertinentes, les questions de BettieRose, tout comme tes réponses, je vais m’y atteler aussi, il y a vraiment de quoi dire ! En tout cas, je te rejoins sur tous les points…
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Ah ben chouette j’ai hâte de te lire. C’est vrai que ça demande réflexion.
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C’est intéressant mais à mon avis, on ne peut pas l »ire trop ». On peut être rassasié, oui mais lire trop, c’est comme;lire vite: ça n’existe pas.
parce que « beaucoup » lire pour l’un ne l’est pas pour les autres (idem: vite, pas assez, beaucoup et autres qui sont des jugements de valeur, mais pour qui? ….)
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[…] ma décharge, j’avais tout de même pris le temps de répondre aux questions sur le statut de blogueur-lecteur posées par notre flamand rose […]
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