Résumé.
Editions Tohu-Bohu. Parution mars 2018 Prix : 19€
Dans un monde envahi d’images, de marques, où la notoriété se vend par images au kilo, V19, jeune chaîne de télévision, décide de lancer une émission de télé-réalité novatrice Obsession Célébrité qui aurait pour vocation paradoxale de guérir les candidats de leur désir de célébrité.
Tollés et scandales s’enchaînent autour de ce concept qui semble fallacieux et plus racoleur qu’autre chose. Pourtant derrière l’émission décriée, sa créatrice Lyne Paradis, neuroscientifique de son état, nourrit une réelle ambition : dans cette société où l’image, les médias et la célébrité facile ne cessent de nourrir l’envie, la jalousie, elle souhaite parvenir à libérer l’homme de ses désirs. De cette prison de désirs qui le torturent et le rendent malheureux.
Peu à peu pourtant, sa création lui échappe et provoque la fureur de Gerhard Lebenstrie, psychiatre de son état. D’émissions en batailles rangées juridiques, d’innovations scientifiques en manipulations, l’antagonisme entre eux les deux devient une véritable guerre entre neuroscience et psychiatrie. Qui a réellement le secret du bonheur ? Sommes-nous réellement asservis par nos désirs sans cesse exacerbés ? Faut-il les assumer ou les dompter ?
Où tout cela finira-t-il ?
Mon avis.
Nicolas Gaudemet signe là un roman absolument bluffant, qui nous renvoie un miroir défragmenté de notre société. Se jouant des codes, il fait de notre réalité une fiction, de personnalités des personnages, pour mieux nous en renvoyer ce reflet grinçant et dérangeant.
A travers le roman, c’est une critique acerbe et sans concession de cette célébrité facile qu’offre notre société médiatique. Un rouage après l’autre, l’auteur démontre la puissante manipulation dont nos esprits sont en permanence les victimes. Sans cesse, notre désir est attisé. Désir d’être aimé, d’être célèbre, d’être riche, d’être reconnu. Désir d’être et de paraître aux yeux des autres tout simplement.
A courir perpétuellement après nos désirs, sommes-nous véritablement heureux ? Pas si l’on en croit Lyne Paradis, la neuroscientifique, au coeur du roman.
Mais si la question est louable, le personnage en revanche est discutable autant sur ses méthodes que sur ses motivations. Car, en réalité, nul n’est archange dans cette histoire. Désir, pouvoir et manipulation sont au coeur de chaque recoin de l’intrigue. Chacun tire ses fils, joue des bonnes intentions, cachant au fond de lui ce qui le tiraille.
Ce qui se présente au départ comme une simple fiction autour de la télé-réalité devient vite un questionnement de société, voir philosophique. Entre roman d’anticipation, analyse psychanalytique du désir et réflexion sociétale, La Fin des Idoles bluffe son lecteur en éveillant un vrai questionnement.
Impossible de ne pas reconnaître dans la fiction les échos de la réalité. De deviner ou de retrouver des chantres des médias. De ne pas voir en Paloma la bimbo de télé-réalité, le reflet d’une certaine Loana ou d’une Nabilla… Et de se demander avec un certain malaise : comment en est-on arrivés là ? A quel moment les médias ont-ils pris le pas à ce point sur nos esprits, jusqu’à gouverner nos désirs, attiser notre soif de célébrité ?
La Fin des Idoles porte bien son nom. Dans le titre, tout est dit ou presque. Et chacun y prendra ce qu’il voudra y prendre au final, du psychanalytique, du roman dystopique ou de la critique médiatique, voir sociologique. Certains passages sur les théories psychanalytiques pourront se révéler quelque peu indigestes, mais l’ensemble compose un tableau passionnant, qui se dévoile pièce par pièce, au fur et à mesure que tombent les masques.
En savoir plus : La Fin des Idoles
Laisser un commentaire